1. Séparation : qui reste ? (pas d’enfants)

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En cas de séparation, à qui revient l’usage de l’appartement ou de la maison familiale (couple sans enfants) ?

Cecilia et Nicolas habitent un appartement dont Nicolas est locataire. Le couple n’a pas d’enfant. Nicolas veut se séparer de Cecilia sans avoir vraiment de bonne raison mais désire continuer à occuper l’appartement conjugal au motif qu’il est lui seul locataire.
En a-t-il le droit ?

Réponse

Au stade de la séparation, il s’agira seulement de décider quel époux occupera le logement familial, en aura (provisoirement) l’usage (la jouissance). Cela ne dépendra pas de la question de savoir quel époux est propriétaire ou locataire de l’appartement ou de la maison familiale. Ce sera seulement lors de la liquidation du régime matrimonial que la question de la propriété ou de l’attribution du bail sera définitivement tranchée.
Sur les cas dans lesquels le régime matrimonial de la participation aux acquêts est dissous et liquidé, voir Effets communs >> Régimes matrimoniaux >> 2. Participation aux acquêts.

En cas d’accord entre Cecilia et Nicolas

Cecilia et Nicolas peuvent décider de se séparer sans s’adresser au juge en passant – ou non – une convention privée fixant notamment l’attribution du logement conjugal à l’un ou à l’autre. Ils peuvent aussi décider de déposer une requête commune auprès du juge des mesures protectrices de l’union conjugale.

En cas de désaccord entre Cecilia et Nicolas

Nicolas et Cecilia peuvent ne pas parvenir à se mettre d’accord sur l’occupation de l’appartement. Si Cecilia entend rester dans l’appartement commun, elle pourra saisir le juge des mesures protectrices de l’union conjugale et faire valoir qu’elle ne refuse pas la vie commune contrairement à Nicolas et qu’il appartiendra donc à Nicolas de se trouver un nouveau logement. Le juge appréciera sur la base de l’ensemble des circonstances et protégera la partie qui a le plus grand besoin de l’appartement, en n’accordant qu’une importance secondaire au fait que Nicolas est éventuellement titulaire du bail.
À noter que Nicolas pourrait lui aussi dans certains cantons saisir le juge des mesures protectrices de l’union conjugale en invoquant son intention de cesser la vie commune en vue d’un divorce ultérieur.
Sur l’attribution du logement familial lorsque le couple a des enfants, voir 7. Maison et séparation (couple avec enfants).

Pour en savoir plus (sources & règles applicables en droit suisse)

Vie commune et partage du logement familial: la règle durant le mariage

Aux termes de la loi, durant le mariage, les époux se doivent l’un à l’autre fidélité et assistance., voir Art. 159 A. Union conjugale; droits et devoirs des époux.
Les époux choisissent ensemble la demeure commune, voir Art. 162 D. Demeure commune.
Chaque époux doit donc en principe cohabiter avec son conjoint sauf impératif de force majeure ou menace contre ses biens, sa personne ou ceux de la famille. Voir 2. Partir pour se protéger.

Séparation avec accord des époux au sujet de la demeure conjugale

Les conjoints peuvent décider de se séparer d’un commun accord et s’entendre sur l’attribution de la demeure conjugale ou familiale au mari ou à la femme. Les époux peuvent déposer des conclusions d’accord devant le juge des mesures protectrices de l’union conjugale (mais ils n’y sont pas obligés).

Demander au juge de trancher la question de savoir qui restera

Si les époux ne parviennent pas à s’entendre au sujet de l’attribution (la jouissance) de l’habitation familiale, l’un ou l’autre des époux (ou les deux) peut s’adresser au juge des mesures protectrices de l’union conjugale. Le juge prendra alors les mesures en ce qui concerne notamment le logement et le mobilier de ménage pour la période de la séparation durant le mariage avant toute éventuelle procédure de divorce. À ce sujet voir Quels choix ? >> Alternatives au divorce >> Protéger l’union conjugale (séparation). Le juge des mesures protectrices de l’union conjugale attribuera ainsi provisoirement le logement conjugal au mari ou à la femme, qu’il s’agisse d’un location ou de la propriété des époux, d’un appartement ou d’une maison.
À noter que selon la pratique de certains cantons, l’époux qui a l’intention de cesser la vie commune peut saisir le juge des mesures protectrices de l’union conjugale. Voir 3. Cesser la vie commune ?

Comment décide le juge ?

Le juge des mesures protectrices de l’union conjugale fait usage de son pouvoir d’appréciation et procède à une pesée des intérêts en présence, de façon à prononcer la mesure la plus adéquate au vu des circonstances concrètes.

À qui le logement sera le plus utile ?

En premier lieu, le juge doit examiner à quel époux le domicile conjugal est le plus utile. Ce critère conduit à attribuer le logement à celui des époux qui en tirera objectivement le plus grand bénéfice, au vu de ses besoins concrets. À cet égard, entrent notamment en considération l’intérêt de l’enfant, confié au parent qui réclame l’attribution du logement, à pouvoir demeurer dans l’environnement qui lui est familier, l’intérêt professionnel d’un époux, qui, par exemple, exerce sa profession dans l’immeuble, ou encore l’intérêt d’un époux à pouvoir rester dans l’immeuble qui a été aménagé spécialement en fonction de son état de santé.

Qui peut le plus facilement déménager ?

Si ce premier critère de l’utilité ne donne pas de résultat clair, le juge doit, en second lieu, examiner à quel époux on peut le plus raisonnablement imposer de déménager, compte tenu de toutes les circonstances. À cet égard, entrent notamment en considération l’état de santé ou l’âge avancé de l’un des époux qui, bien que l’immeuble n’ait pas été aménagé en fonction de ses besoins, supportera plus difficilement un changement de domicile, ou encore le lien étroit qu’entretient l’un d’eux avec le domicile conjugal, par exemple un lien de nature affective. Des motifs d’ordre économique ne sont en principe pas pertinents, à moins que les ressources financières des époux ne leur permettent pas de conserver ce logement.

Qui a des droits ?

Si ce second critère ne donne pas non plus de résultat clair, le juge doit alors tenir compte du statut juridique de l’immeuble et l’attribuer à celui des époux qui en est le propriétaire ou qui bénéficie d’autres droits d’usage sur celui-ci. Voir TF, 5A_575/2011 consid. 5.1.

Attribution du logement par le juge : pour quelle durée ?

Le droit de jouissance de l’appartement octroyé à l’un ou l’autre conjoint, selon décision du juge des mesures protectrices de l’union conjugale dure aussi longtemps que les mesures de protection l’union conjugale déploient leurs effets. Ces mesures tombent (deviennent caduques) par l’expiration d’une durée déterminée, par la reprise de la vie commune ou encore par l’ordonnance de mesures provisoires dans le cadre de la procédure de divorce ou de séparation de corps.
À noter enfin que dans un divorce conflictuel le juge du divorce prend des mesures provisionnelles durant la procédure de divorce en s’inspirant des mêmes principes. Les mesures provisionnelles sont les mesures prises en cas de divorce conflictuel pour organiser la vie séparée pendant la procédure de divorce.Voir Quels choix ? >> Questions pratiques >> Requérir des mesures provisionnelles.