
Un couple peut-il divorcer en Suisse si le mari ou la femme est étranger ou s’ils se sont mariés à l’étranger (couple sans enfants) ?
Oliver, ressortissant américain, vit en Suisse depuis de nombreuses années avec son épouse Lea, de nationalité américaine également. Le mariage a été célébré aux États-Unis. Léa déclare aujourd’hui qu’elle veut divorcer/ se séparer de corps.
Pourra-t-elle agir auprès du juge suisse ?
Réponse
Vérifier tout d’abord si une convention internationale a été conclue entre la Suisse et l’Etat d’origine
Il n’existe aucune convention entre la Suisse et les Etats-Unis régissant la compétence du juge suisse pour statuer sur une action en divorce ou en séparation de corps introduite en Suisse et dont l’un des époux est de nationalité américaine.
Dans la négative, le droit suisse s’applique
La loi fédérale de droit international privé est donc applicable et Léa, domiciliée en Suisse depuis de nombreuses années, pourra agir auprès du juge de son domicile suisse. La nationalité étrangère des conjoints et la célébration du mariage à l’étranger n’y font nullement obstacle.
Sur la question de la compétence internationale du juge suisse au cas où Lea vit avec des enfants à l’étranger, voir 3. Divorcer en Suisse (enfants à l’étranger) ?
Concernant le droit national applicable lorsque le couple a une nationalité commune comme Lea et Olivier, voir 10. Divorce international – Droit suisse applicable ?
Pour en savoir plus (sources & règles applicables en droit suisse)
Qu’est-ce qu’un couple présentant un profil international ?
Lorsque le couple présente des aspects internationaux tels en particulier que le lieu du mariage, la nationalité, ou encore le domicile des époux, la détermination du juge compétent pour se prononcer sur une action en divorce ou en séparation de corps ne se fait pas selon les règles internes ordinairement applicables mais selon des règles particulières: les règles de droit international privé. Ces règles ont notamment pour objet de déterminer si le juge suisse a la compétence territoriale pour statuer sur l’action en justice introduite par les époux, et si tel est cas, sur la base de quel droit national il va juger la cause, le droit suisse ou celui d’un autre État.
Compétence du juge suisse ?
Convention internationale réglant la compétence du juge suisse ?
Pour déterminer la compétence du juge suisse en cas de couples présentant des aspects internationaux, il convient en premier lieu de rechercher si la Suisse a conclu avec l’autre État concerné une convention internationale particulière avec cet État (convention dite bilatérale) ou générale signée par plusieurs États, dont l’État en question (convention dite multilatérale) qui régisse les questions à résoudre, notamment la compétence du juge suisse.
À défaut de convention internationale, la loi fédérale de droit international privé règle la compétence du juge suisse
En l’absence d’une telle convention internationale entre la Suisse et l’État concerné, ce sont les règles de la loi fédérale de droit international privé qui sont applicables.
Compétence du juge suisse au domicile du mari ou de la femme
Aux termes de la loi fédérale de droit international privé, sont compétents pour connaître d’une action en divorce ou en séparation de corps:
- les tribunaux suisses du domicile de l’époux défendeur ;
- les tribunaux suisses du domicile de l’époux demandeur, si celui-ci réside en Suisse depuis une année ou est suisse.
Voir Art. 59 I. Compétence / 1. Principe.
Un époux fraichement arrivé en Suisse y a-t-il déjà son domicile ?
Selon le Tribunal fédéral, il est vrai que l’élément objectif du domicile (c’est-à-dire la présence physique en un endroit donné) ne suppose pas nécessairement que le séjour ait déjà duré un certain temps; si la condition subjective (c’est-à-dire l’intention de rester durablement en ce lieu) est par ailleurs remplie, la constitution d’un domicile peut se produire dès l’arrivée dans le nouveau pays; en d’autres termes, pour déterminer si l’intéressé s’y est créé un domicile, ce n’est pas la durée de sa présence à cet endroit qui est décisive, mais bien la perspective d’une telle durée. C’est ainsi que le Tribunal fédéral a jugé que l’existence d’un domicile en Suisse n’était pas exclue du seul fait que le demandeur avait ouvert action en divorce six jours seulement après son arrivée. Voir TF, 5A_659/2011, consid. 2.3.