En cas de contribution extraordinaire d’un conjoint à l’entretien de la famille, ce conjoint peut-il réclamer une indemnité à l’autre ?
Pendant le mariage, Julie a assumé seule l’entretien du ménage, en travaillant alors que Fabien suivait des études universitaires pendant plusieurs années. Aujourd’hui Fabien, qui réalise des revenus supérieurs à Julie, veut mettre un terme à leur vie commune.
Julie peut-elle réclamer une indemnité à Fabien ?
Réponse
Julie a assumé seule les charges de la famille permettant ainsi à Fabien de se consacrer à sa formation universitaire. Si l’on admet selon un calcul simplifié que Julie a contribué à 100 % à l’entretien de la famille alors qu’elle devait y contribuer à 50 % à titre personnel, Julie pourra réclamer à Fabien une indemnité correspondant à 50 % des frais d’entretien à titre d’entretien extraordinaire de la famille, cela pour toute la période durant laquelle elle aura assumé seule l’entretien de la famille. Sur les règles applicables en matière d’entretien de la famille, voir 4. Avoir travaillé plus que l’autre.
Pour en savoir plus (sources & règles applicables en droit suisse)
Aux termes de la loi, lorsqu’un époux, par ses revenus ou sa fortune, a contribué à l’entretien de la famille dans une mesure notablement supérieure à ce qu’il devait, il a droit à une indemnité équitable.
Un époux ne peut élever ces prétentions lorsqu’il a fourni sa contribution extraordinaire en vertu d’un contrat de travail, de prêt ou de société ou en vertu d’un autre rapport juridique.
Voir Art. 165 E. Entretien de la famille / III. Contribution extraordinaire d’un époux.
Quand la contribution d’un conjoint est-elle extraordinaire ?
Selon le Tribunal fédéral, pour déterminer si une indemnité est due, il convient dans un premier temps de faire la part entre l’entretien normal et les contributions extraordinaires, la convention entre les époux concernant leurs contributions respectives constituant la base à cette détermination. À défaut d’accord entre les époux sur la répartition de leurs tâches, la mesure de l’apport pécuniaire s’apprécie selon les circonstances objectives existant au moment où celui-ci a été apporté, sans égard au fait que l’époux bénéficiaire était ou non conscient que la participation financière de son conjoint dépassait les devoirs imposés par le droit matrimonial. Il importe d’évaluer dans chaque cas la nature et l’ampleur de l’apport pécuniaire, en le mettant en rapport avec les autres prestations fournies comme contribution ordinaire aux charges du mariage. En l’absence de critères généraux applicables dans ce domaine, le juge statue en équité en se fondant sur les particularités importantes de l’espèce, voir TF, 5A_540/2011, consid. 7.1.2.
Ainsi, il s’agit de tenir compte des contributions respectives du mari et de la femme aux charges familiales. Un époux devra une indemnité à l’autre conjoint lorsqu’il sera manifeste que l’autre conjoint aura beaucoup plus oeuvré pour le bien de la famille que lui-même.
Pour admettre le droit à une indemnité à ce titre, il faut que le conjoint ait non seulement contribué à l’entretien de la famille dans une mesure qui excède la moyenne mais encore que cette contribution ait atteint une telle ampleur qu’elle soit considérée comme notablement supérieure à ce qui est normalement exigé.
Dans un tel cas, il existe un droit à indemnité même si les conjoints n’ont pas prévu de remboursement ou de contre-prestation à une prestation extraordinaire à l’entretien de la famille.
Le montant de l’indemnité
L’époux qui a fourni une prestation extraordinaire à l’entretien de la famille ne peut pas réclamer la restitution de toutes ses avances mais une indemnité équitable. En effet, il faut tenir compte du fait que le conjoint devait de toute façon remplir son devoir d’entretien, eu égard à ses facultés de contribution et compte tenu de la répartition des tâches, du train de vie adoptée par les époux ainsi que des avantages tirées de la vie en commun.
Quand réclamer à l’autre conjoint l’indemnité ?
L’indemnité peut être réclamée en tout temps durant le mariage mais en cas de divorce, au plus tard avant la fin de la procédure de divorce.
Le conjoint débiteur peut demander des délais de paiement si le règlement de la dette l’expose à des difficultés graves qui mettent en péril l’union conjugale, à charge de fournir des sûretés si les circonstances le justifient.