
Comment s’effectue la liquidation du régime matrimonial (exemple simplifié) ? (Régime matrimonial de la participation aux acquêts)
Mariée à Stéphane qui veut se séparer, Joëlle se demande comment leur biens seront partagés si le juge des mesures protectrices de l’union conjugale ordonne la séparation de biens ou encore si le divorce est prononcé.
Le couple n’a pas conclu de contrat de mariage et est soumis au régime légal ordinaire de la participation aux acquêts. Comment liquider le régime matrimonial du couple ?
Situation de Joëlle et Stéphane
Joëlle et Stéphane ont comme tout avoir – on fait ici abstraction de leur deuxième pilier – les biens communs suivants :
- des liquidités de 10,000 fr. sur un compte postal commun,
- du mobilier estimé à une valeur de 30,000 fr.
Stéphane est en outre propriétaire en particulier :
- d’effets et objets personnels (habits, ordinateur, etc…) pour 5,000 fr,
- d’une voiture estimée aujourd’hui à 20,000 fr. financée pour moitié par des économies réalisées sur son salaire avant le mariage et pour moitié par un leasing,
- d’actions estimées à 50,000 fr. obtenues d’un héritage,
Joëlle est pour sa part propriétaire :
- d’effets et objets personnels (vêtements, instruments de musique) pour 3000 fr,
- d’une assurance-vie financée au moyen de son salaire dont la valeur est estimée à 50,000 fr.
Réponse
Dans l’exemple chiffré concernant Stéphane et Joëlle, la liquidation du régime matrimonial s’opère comme suit :
Stéphane
- Actifs de Stéphane: Fr. 95,000.- .
- Passifs de Stéphane grevant ses acquêts: Fr. 0.-.
- Dissociation (déduction) des biens propres de Stéphane: Fr. 70,000.-.
- Détermination du bénéfice de Stéphane: Fr. 25,000.-.
Joëlle
- Actifs de Joëlle: Fr. 73,000.-.
- Passifs de Joëlle grevant ses acquêts: Fr. 0.-.
- Dissociation (déduction) des biens propres de Joëlle: Fr. 3,000.-.
- Détermination du bénéfice de Joëlle: Fr. 70,000.-.
Au vu de ce qui précède, Joëlle a droit à la moitié du bénéfice de Stéphane, soit 12,500 fr. Pour sa part, Stéphane a droit à la moitié du bénéfice de Joëlle, soit 35,000 fr. Les créances se compensant, Stéphane peut réclamer en définitive 22,500 fr. au titre de participation au bénéfice de liquidation du régime de participation aux acquêts. Ainsi, bien que Stéphane dispose de plus de biens que Joëlle, c’est elle qui doit partager le plus ses avoirs. Cela est dû à la nature différente des biens à partager dans le patrimoine de Stéphane et dans celui de Joëlle.
Pour un exemple de liquidation du régime matrimonial de la participation aux acquêts incluant diverses créances contre le conjoint ainsi que des récompenses entre les acquêts et les biens propres d’un même époux, voir 10. À l’heure des comptes (ex. chiffré complexe).
Pour en savoir plus (sources & règles applicables en droit suisse)
Qu’est-ce que le régime matrimonial de participation aux acquêts ?
Seul le régime matrimonial de participation aux acquêts (et celui de la communauté de biens) est liquidé en cas de dissolution du régime matrimonial. Le régime de la séparation de biens n’a en revanche pas à être liquidé lors de sa dissolution.
Sur la notion de régime matrimonial de participation aux acquêts et le moment de sa dissolution, voir Effets communs >> Régimes matrimoniaux >> 2. Participation aux acquêts.
1ère étape de la liquidation: liste de tous les biens et dettes
La première étape de la liquidation du régime matrimonial consiste à dresser la liste de tous les biens (actifs) et de toutes les dettes (passifs) de chaque conjoint et d’en déterminer la valeur. La propriété d’un époux sur un bien ou une créance se détermine selon les règles ordinaires indépendamment de la liquidation du régime matrimonial. Chaque conjoint reprend ceux de ses biens qui sont en possession de son conjoint (sur la propriété d’un bien, voir Effets communs >> Propriété >> 1. C’est à moi !. De façon générale, les bien sont estimés à leur valeur vénale, à savoir le prix que l’obtiendrait vraisemblablement si l’on vendait l’objet considéré. En cas de divorce, les acquêts existant à la dissolution du régime matrimonial, soit le jour du dépôt de la demande en divorce, sont estimés à leur valeur au jour de la clôture de la liquidation du régime matrimonial, soit le jour du jugement de divorce.
À noter que les véhicules sont évalués d’après les tables Eurotax ( www.eurotax.ch). Le mobilier et autres objets ménagers sont évalués selon leur prix coûtant duquel on déduit toutefois une somme significative pour vétusté. Les assurances-vie relevant du troisième pilier sont en principe évaluées à leur valeur de rachat. Cette valeur peut être obtenue en tout temps auprès des compagnies d’assurances.
Si les époux sont copropriétaires, ils devront liquider leur copropriété, qu’il s’agisse d’un bien ordinaire (bien mobilier) ou d’une maison ou appartement (bien immobilier).
2e étape de la liquidation : on sépare les acquêts et les biens propres
Dans la deuxième étape, on dissocie (déduit) les biens propres de chaque conjoint de ses acquêts.
En cas partage d’un bien qui était copropriété des deux époux, le résultat du partage de la copropriété est intégré soit dans la masse des biens propres de chaque conjoint, soit dans la masse des acquêts de chaque époux. Seuls la valeur des acquêts sera sujet à partage, chaque époux conservant pour lui seul ses biens propres.
3e étape de la liquidation : on calcule le bénéfice des acquêts
Dans une troisième étape, on détermine pour chaque conjoint le bénéfice ou le déficit de ses acquêts. Il y a un bénéfice s’il reste un solde positif après déduction des dettes grevant les acquêts de chaque conjoint, respectivement déficit dans le cas contraire. Au sujet des dettes, il y a lieu de préciser que les dettes de chaque conjoint grèvent soit la masse de ses acquêts, soit la masse de ses biens propres, (voir 3. Partage des économies : impact des dettes.)
En cas de bénéfice des deux conjoints, chaque époux a droit à la moitié de la valeur des acquêts de l’autre époux. À noter que le conjoint créancier n’a pas de droit à la propriété des acquêts de l’autre, mais seulement à une créance monétaire correspondant à la moitié de la valeur des acquêts.
En cas de déficit des deux conjoints, chacun assume ses dettes sans pouvoir faire valoir de créance de ce chef à l’égard de l’autre conjoint.
En cas de situation déficitaire d’un seul conjoint, l’époux déficitaire peut prétendre à la moitié des acquêts de l’autre, mais assume seul ses dettes sans que le conjoint bénéficiaire doive reprendre une partie des dettes.