7. Tort moral pour adultère ?

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Le conjoint victime d’un adultère peut-il réclamer une indemnité pour tort moral ?

Noémie a été trompée par Josef. Elle se sent humiliée profondément.
Peut-elle demander réparation du tort moral ?
 

Réponse

Noémie n’obtiendra vraisemblablement pas une indemnité pour tort moral du fait de la seule infidélité de Josef, qui contrevient pourtant à son devoir de fidélité dans le cadre du mariage consacré par la loi. Il faudrait des circonstances vraiment exceptionnelles pour que le juge octroie une indemnité pour tort moral, circonstances rendant particulièrement graves l’atteinte subie par Noémie. Ces circonstances restent à examiner dans le cas particulier.

 

Pour en savoir plus (sources & règles applicables en droit suisse)

La fidélité envers son conjoint : un devoir inscrit dans la loi

Aux termes de la loi, les époux se doivent l’un à l’autre fidélité et assistance. Voir Art. 159 A. Union conjugale ; droits et devoirs des époux.

 

Tort moral en général

Aux termes de la loi, celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d’argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l’atteinte le justifie et que l’auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement. Voir Art. 49 A. Principes généraux / V. Cas particuliers / 3. Atteinte à la personnalité.

 

Tort moral en cas d’adultère ?

Selon la Cour civile du canton de Neuchâtel, le tort moral consiste dans les souffrances physiques ou psychiques que ressent le lésé à la suite d’une atteinte à sa personnalité. Alors même que l’adultère n’est plus punissable pénalement et n’est plus en tant que tel une cause de divorce, on admet qu’il constitue toujours un acte illicite sur le plan civil, source potentielle d’une obligation de réparer le tort moral causé. Sont susceptibles d’être recherchés civilement le conjoint de la victime, de même que le tiers avec qui il entretient une liaison, à condition que ce dernier sache que son partenaire est marié. Dans le même arrêt, la Cour civile du canton de Neuchâtel a toutefois considéré que lorsqu’une liaison adultère entretenue durant un mariage débouche sur la naissance d’un enfant dont il s’avère ensuite que le mari n’est pas le père, cette relation ne saurait constituer, à elle seule, le fondement d’une prétention en réparation du tort moral. À défaut, pratiquement toute action en désaveu devrait donner lieu au paiement d’une indemnité pour tort moral, ce qui n’est clairement pas le cas en pratique. Dans le cas qui lui était soumis, le même tribunal a considéré que cette situation de fausse paternité n’avait duré que quelques mois et qu’elle était donc loin d’avoir eu le retentissement que pourrait avoir une situation analogue qui aurait duré plusieurs années. Ainsi donc, les souffrances psychiques du mari, consécutives à la découverte de sa non-paternité, n’avaient, au vu des circonstances, pas atteint un degré de gravité élevé ni surtout n’étaient le fait d’une atteinte grave à sa personnalité dont sa femme et le père de l’enfant devaient être tenus pour responsables. La Cour civile du canton de Neuchâtel a donc rejeté la prétention du mari en réparation d’un tort moral. Voir Jugement de la Cour civile, Neuchâtel, 2008, CC.2005.64, consid. 3.

 

À strictement parler, l’adultère reste un acte illicite dans la mesure où il contrevient aux devoirs d’un époux envers l’autre comme prévus par la loi. Toutefois, ce fait seul ne conduit pas à une indemnité pour tort moral (même la naissance d’un enfant à la suite de l’adultère ne donne pas nécessairement lieu à une telle indemnité, selon l’arrêt cantonal précité). En effet, en Suisse l’adultère n’est plus aujourd’hui une cause de divorce et n’est plus punissable pénalement depuis 1990. À l’heure où des sites Internet proposent l’adultère en ligne, force est de constater que la société fait preuve d’une certaine tolérance au sujet de l’adultère. Dès lors, le juge ne va pas aisément admettre une indemnité pour tort moral en cas d’adultère, il faudrait des circonstances particulières pour admettre une gravité particulière justifiant une indemnité pour tort moral, par exemple les convictions religieuses marquées du couple.